Critique Ciné

The Killer David Fincher et sa fascination pour les psychopathes

Qu’est-ce qui a pu donner envie à David Fincher d’adapter la bande-dessinée Le tueur de Matz et Luc Jacamon ? Entre continuité avec ses anciens films et étrange ascétisme, cette nouvelle production Netflix marque un point important dans la carrière du cinéaste.

Dix-huit ans de gestation : c’est ce qu’il aura fallu à David Fincher pour adapter le Tueur, bande dessinée française du duo Matz et Luc Jacamon. Sorti vendredi 10 novembre sur Netflix, il marque le retour de David Fincher au polar après sa parenthèse Mank, film très auteurisant en noir et blanc qui racontait les origines du projet Citizen Kane d’Orson Welles. Ainsi que le révèle le journaliste Jérôme Lachasse sur BFMTV, la bande dessinée Le Tueur intéresse depuis longtemps Hollywood, de Brad Pitt à Tobey Maguire. C’est aujourd’hui avec Michael Fassbender, en tête d’affiche, qu’on voyait moins dans des rôles de premiers plans, que le film voit le jour.

L’histoire est on ne peut plus simple : un tueur applique froidement sa méthode pour éliminer ses cibles. Et alors qu’une de ses missions ne se passe pas comme prévue, le voilà à devoir s’adapter, à réagir vite s’il ne veut pas lui-même être tué. Le film offre avec une voix off très présente les pensées de ce professionnel du crime. Il répète ses mantras comme “Anticipe. N’improvise pas.” tout en écoutant en boucle The Smith. Le spectateur assiste à l’application de ses méthodes. Le film, s’il bénéficie de la précision magistrale de la mise en scène de son auteur, se révèle étrangement sec, à la moelle, presque dénudé de tout fond. Quand on se souvient de la richesse scénaristique de ses films comme Gone Girl ou Social Network, on ne peut qu’être un peu frustré de voir Fincher se contenter d’une histoire aussi simple.

Reste que le film se situe aussi dans la continuité de son œuvre. Celle d’un homme qui a raconté le crime sous toutes ses formes : le polar traumatisant Seven, l’enquête kafkaïenne de Zodiac, le home-invasion Panic Room, ou la plongée dans le profiling (cette technique consistant à comprendre le fonctionnement des serial-killer) dans sa série (inachevée !) Mindhunter. Même son Alien 3, film répudié par son auteur, était truffé de dangereux criminels. Surtout, ce personnage de killer est une sorte de prolongement du psychopathe Tyler Durden de Fight Club : une voix intérieure, une obsession, une violence froide. Ce sont presque les deux faces d’une même pièce.

A désormais plus de 60 ans, David Fincher a peut-être passé la période la plus prolifique et inspirée de sa carrière, de Benjamin Button à Millenium et traîne derrière lui nombres de projets abandonnés, comme le 20 000 lieues sous les mers annulé par Disney ou la saison 3 de Mindhunter. Avec Mank et The Killer, Fincher semble dire qu’il fait ce qu’on l’autorise encore à faire, et que Netflix lui donne une vraie liberté créatrice. Alors si ce ne sont pas forcément ses plus grands films, c’est assez rassurant de voir un maître du cinéma américain continuer de s’amuser.

écrit par Alexandre Mathis
Journaliste aimant les films triste et le Parrain

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page